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dimanche 3 septembre 2017

L'échec scolaire



L’échec scolaire est une notion récente apparue dans les années 1950 (Best, 1996). Son existence était reconnue mais sans savoir ce que cela désignait véritablement (Morel, 2014).

Bien que les contours de sa définition soient flous (Morel, 2014) ou qu’il soit difficile « d’en cerner des contours achevés » (Best, 1996), des auteurs ont tenté de définir l’échec scolaire soit à partir de ses possibles causes, soit à partir de ses conséquences.



http://www.deboecksuperieur.com/ouvrage/9782804106676-laide-strategique-aux-eleves-en-difficulte-scolaire
Vianin (2009, p.305-308) résume ainsi ses principales causes :

- les aptitudes intellectuelles,
- les troubles affectifs / psychologiques,
- le milieu socioculturel,
- l’échec de l’école,
- la fonction de sélection de l’école,
- les méthodes pédagogiques,
- l’effet-maître et l’effet établissement,
- la famille.
Les conséquences de l’échec scolaire sont également diverses et variées : orientation vers le spécialisé (Rosenblum, 1961), élèves « décrocheurs » (Dolignon, 2005), jeunes relégués dans des voies professionnelles non souhaitées, redoublement, sortie du système scolaire sans qualification et mauvais scores aux examens (Best, 1996). 
  
Comme le souligne Curchod-Ruedi et Doudin (2015, p.76) "l'idée d'aborder la compréhension des émotions à l'école peut susciter des réactions vives et contrastées.". C'est pourquoi, pour apporter quelques repères aux enseignants, j'ai choisi de vous présenter plus en détails un livre : "Comprendre et soigner l'enfant en échec scolaire - Traitements et remédiations" de Maurice Despinoy. En bas de l'article, vous trouverez des références bibliographiques afin de poursuivre, si vous le souhaitez, votre réflexion.


https://www.amazon.fr/Comprendre-soigner-lenfant-%C3%A9chec-scolaire/dp/2100070398L'auteur a publié ce livre en 2004 aux Editions Dunod. On peut lire sur la 4ème de couverture que l'auteur "est psychiatre et psychanalyste, praticien hospitalier, fondateur d'un Centre de prévention et de traitement des jeunes enfants à Marseille. Il a également publié aux éditions Armand Colin Psychopathologie de l'enfant et de l'adolescent."

Bien que le livre ait presque 15 ans, des points restent toujours d'actualité. 
Pour Despinoy (p.3) "La mobilisation affective qu'entraine la situation d'apprentissages est une des causes des échecs observés car elle interfère avec les processus des contrôles cognitifs"
 
Il débute son propos par la définition d'apprendre (chapitre 1) et présente l'importance de l'attachement dans les différentes acquisitions (langage...) : "pour vivre et se développer, le bébé doit bénéficier d'une relation d'attachement, c'est-à-dire de la disponibilité et affective d'un adulte compétent" (p.21). Il termine se chapitre par une définition de l'intelligence et de ses processus. Il pointe que "les recherches actuelles sur les processus de l'apprentissage montrent d’ailleurs que la motivation et la personnalité sont des facteurs essentiels de l'efficacité intellectuelle."

Le deuxième chapitre est consacré à la psychanalyse et la pensée. Despinoy n'oppose pas les conceptions psychanalytiques et cognitives mais il est, pour lui, "illusoire" (p.53) de rechercher une convergence immédiate. Il est intéressant de lire dans ses propos la pr'ise de distance qu'il peut exprimer sur certains concepts psychanalytiques qui ont une valeur historique et ceux qui ont constitué "des voies de recherches fructueuses" (p.33). Nous retrouverons ainsi les concepts de curiosité et de sublimation, les contenants de pensée de Gibelo...

Le troisième chapitre est consacré à "apprendre à l'enfant".
"L'étude de la relation pédagogique elle-même, une fois reconnue sa nécessité, conduit à confronter la notion de construction piagétienne à celle de transmission du savoir. Mais les descriptions de cette relation présupposent toujours que l'élève désire apprendre et que le maître est heureux d'enseigner."(p.56)
Pour Despinoy, l'enfant ne manifeste de la curiosité et de l'intérêt pour ce qui est nouveau que s'il est en "situation d'attachement sécurisé" (p.56)
" [...] pour qu'un enfant apprenne, il a besoin de la relation avec un adulte qu'il utilise comme contenant à ses émotions et comme informateur compétent."(p.56)

La relation à l'école est présente dans ce chapitre. Il pointe notamment une fonction de l'école : apprendre ce qui est demandé et non plus ce qui intéresse l'enfant. Il évoque notamment les apports de Bruner et de Vygostski.
Le plaisir d'apprendre et les transferts sont, pour l'auteur, liés aux conditions ordinaires de la scolarisation qui sont source d'expériences émotionnelles multiples. (p.70). 

Les difficultés d'apprendre sont détaillés dans le chapitre 4. Les règles contradictoires entre l'école et la société peuvent être source de difficultés. Les enfants qui ont un "développement satisfaisant " tolèrent cette situation sans "risquer le désir d'apprendre" (p.74). Il précise que "[...] cet ouvrage n'est pas consacré à l'étude des incidences de la pédagogie sur les échecs scolaires. J'aborderai donc la recherche sur les difficultés d'apprentissage en me limitant à l'étude des particularités psychiques des enfants." (p.75). Après une présentation de la psychopathologie psychanalytique des échecs d'apprentissage, il présente les difficultés ordinaires et les signaux d'alerte. Il conclut ce chapitre par une classification simplifiée des pathologies mentales à l'origine des difficultés d'apprendre. Elles sont regroupées en deux parties (p.95) : les troubles de l'apprentissage font partie d'un ensemble de troubles psychiques (dépression...) et les troubles de l'apprentissage constituent la principale pathologie psychique (retard mental, troubles neurodéveloppementaux...)

Les chapitres 5, 6 et 7 détaillent les troubles de l'apprentissage qui constituent la principale pathologie: le retard mental, l'instabilité ou THADA et les troubles de l'apprentissage de l'écrit et dyslexies.

Le traitement des difficultés d'apprendre est évoqué dans le chapitre 8. Il pointe l'intérêt de la relation avec l'école dans certains projets de soin thérapeutique entre les thérapeutes et la famille. N'oublions pas le nombre conséquent des demandes de consultation en CMP et CMPP par les parents d'après les recommandations de l'école. Il rappelle la place incontournable de la famille et précise que l'entente entre l'école et l'établissement de soin "sécurise la famille" (p.137).

Il détaille, dans le chapitre 9, les classes spécialisées, les instituts médico-éducatifs, la notion d'aide à la scolarisation, des exemples dans des pays étrangers, les SESSAD.... et présente un modèle d'intégration assistée (les premiers AVS...).

La prévention du retard mental est présentée dans le chapitre 10 et notamment quand le retard peut être expliqué par "des carences des relations précoces" (p.173). Il détaille les signaux d'alarme justifiant la prévention et un exemple d'intervention


Le chapitre 11 nous invite à étudier les différentes remédiations possibles pour enseigner aux enfants en difficulté d'apprendre.
Il définit la notion de remédiation et développe les méthodes de Feuerstein et la méthode d'induction de Paour. Il se désole du peu d'impact qu'ont ses méthodes dans l'éducation nationale.

Enfin, l'auteur conclut son propos en évoquant que "l'étude du psychisme souffre d'oppositions qui stérilisent les recherches [...]" (p.205) et l'opposition néfaste "[...] qui marque la frontière entre la psychanalyse et les sciences cognitives."(p.206).


La quatrième de couverture :

Comment, chez l'enfant, le ravissement des découvertes disparaît-t-il pour céder la place à l'ennui ? Comment la scolarité menace-t-elle le plaisir d'apprendre ? Peut-on éviter cette évolution et réunir les conditions nécessaires pour que l'acquisition du savoir demeure une quête personnelle de l'enfant ? Pour répondre à ces questions fondamentales, l'auteur présente tout d'abord les diverses conceptions de l'apprentissage et de ses échecs. Puis il envisage trois pathologies donnant lieu à de nombreuses discussions : dyslexie, instabilité, retard mental. Enfin, il décrit et analyse les principales solutions proposées en milieu scolaire et en centres de consultation. L'expérience des traitements d'enfants en difficulté scolaire contredit les thèses uniquement organicistes. Les processus mobilisés par les psychothérapies et par les modifications des relations scolaires démontrent les effets des expériences relationnelles et l'intérêt d'actions conjuguées, pédagogiques et psychothérapiques, parfois associées à l'utilisation de médicaments. L'auteur démontre, à l'aide de nombreux exemples concrets, la nécessité de conjuguer les actions pédagogiques et psychothérapiques pour traiter au mieux les enfants en difficulté d'apprentissage. Cet ouvrage s'adresse ainsi non seulement aux thérapeutes des équipes de soins mais aussi aux éducateurs qui assistent les enfants en échec scolaire et aux enseignants concernés par les remédiations.


Bibliographie :

  • Best F. (1996). L’échec scolaire. Paris : PUF
  • Curchod-Ruedi D. et Doudin P.-A. (2015) Comment soutenir les enseignants face aux situations complexes ? - Soutien social, Modèle d'intervention. Bruxelles : De Boeck
  • Despinoy M. (2004) Comprendre et soigner l'enfant en échec scolaire - Traitements et remédiations. Paris : Dunod 
  • Dolignon C. (2005). Le vécu de jeunes décrocheurs dans le premier degré de l’enseignement secondaire dans la région du Valenciennois (France) et dans le comté de Kent (Royaume-Uni). Dans Zay D.  Prévenir l’exclusion scolaire et sociale des jeunes (p.103-153). Paris : PUF.
  • Morel S. (2014). La médicalisation de l’échec scolaire. Paris : La dispute
  • Rosenblum E. (1961). Le développement de la pédagogie curative. Enfance, 14(2), p. 165-178. DOI : 10.3406/enfan.1961.2260.
  • Vianin P. (2009). L’aide stratégique aux élèves en difficulté scolaire – Comment donner à élève les clés de sa réussite? Bruxelles : De Boeck.

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